Deux ouvrages dirigés par Philippe Le Guern – « En quête de musique » et « Où va la musique ? » – viennent de paraître autour de la consommation musicale à l’heure de la musimorphose. En voici les quatrièmes de couverture :
En quête de musique : Les représentations et les usages de la musique hérités de l’ère de l’enregistrement sur support physiques (vinyl, cassette, CD) se sont radicalement transformés avec la généralisation des technologies numériques et de l’Internet. Tout sauf figés, les processus d’écoute sont à considérer dans l’histoire d’un ajustement progressif entre des dispositifs techniques et des dispositions d’écoute : le passage de la discomorphose à la numérimorphose constitue une étape essentielle de cette histoire marquée par le téléchargement illégal, le streaming, les lecteurs MP3 ou les algorithmes de la recommandation. Pour autant, nous continuons à mobiliser des catégories ou des notions insuffisamment discutées – le genre musical, l’éclectisme, la légitimité, l’émotion esthétique, etc. – pour appréhender les pratiques et les goûts des auditeurs. De même, les approches employées en situation d’enquête semblent parfois inadaptées face au changement de régime ou d’échelle imposé par le numérique. Ouvrir la boîte noire des méthodes pour étudier représentations et pratiques à l’ère de la musimorphose, telle est l’ambition de cet ouvrage, où se côtoient sociologues, informaticiens, musicologues, psychologues cognitifs, spécialistes en sciences de la communication, de l’éducation et de gestion.
Où va la musique : Embarqués à bord des sondes spatiales Voyager, des disques plaqués or contenant des images et des sons censés représenter la diversité terrestre étaient lancés dans l’espace en 1977 : 90 minutes de musique, dont des oeuvres de Bach, Beethoven, Chuck Berry, Louis Amstrong, Mozart, ou encore des chants de bergers bulgares ou de jeunes filles pygmées, dérivent ainsi depuis dans l’espace intersidéral. On imagine alors la surprise de civilisations extra-terrestres découvrant ces objets déroutants et déjà… obsolètes. Car musique rime, quarante plus tard, avec streaming, Youtube, sodcasting, MP3, Justin Bieber et Hatsune Miku.
Entre dispositifs et dispositions, changements socio-techniques et normes instituées, l’écoute musicale se reconfigure en permanence. Et avec le passage de la discomorphose à la numérimorphose, ce sont peut-être nos manières de découvrir, de classer, de partager la musique qui se sont transformées radicalement : dans ce monde d’abondance, les algorithmes de la recommandation, les casques et les logiciels de stream ripping, les smartphones et les fichiers compressés ont pris le pas sur les CD, la presse rock spécialisée, le disquaire du coin et le son HiFi.
Existe-t-il un fil conducteur, un principe téléologique, qui permette de penser l’histoire de nos oreilles ? Comment décrire nos nouvelles habitudes d’écoute en régime numérique ? Les innovations technologiques nous laissent-elles entrevoir ce que pourraient être nos prochaines expériences de la musique ? En réunissant universitaires et professionnels du secteur, dans une perspective interdisciplinaire, cet ouvrage propose d’apporter des réponses à une question en apparence très simple : où va la musique ?
Philippe Le Guern est professeur à l’Université de Nantes en Sciences de l’information-communication, membre du Centre atlantique de Philosophie, chercheur associé au CRAL-EHESS. Les travaux de Philippe Le Guern portent sur l’impact du virage numérique en art. Il a récemment dirigé deux ANR, l’une consacrée aux professions artistiques et l’autre aux publics de la musique.
Publié par Jean-Philippe Nau sur http://rt11.hypotheses.org/