CFP Revue « Terrains et travaux » – Consommer autrement : histoire, sens et logiques pratiques

Un certain nombre de pratiques, en expansion aujourd’hui, visent à contourner ou contester les circuits économiques traditionnels pour l’acquisition et l’usage de biens et de services. Qu’elles remettent en question la logique maximisatrice du consommateur en promouvant d’autres valeurs éthiques ou écologiques, qu’elles requalifient symboliquement ou distinctivement d’anciennes pratiques (faire du vélo, jardiner) ou qu’elles se situent aux marges des comportements caractéristiques de la société de consommation, ces pratiques ont un statut qui reste encore mal documenté. Ce dossier vise à réunir des contributions empiriques éclairant les logiques économiques, sociales et politiques des pratiques de consommation alternatives, actuelles et passées.

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Argumentaire

Un certain nombre de pratiques, en expansion aujourd’hui, visent à contourner ou contester les circuits économiques traditionnels pour l’acquisition et l’usage de biens et de services : voyager en covoiturage, se loger chez l’habitant, acheter des objets d’occasion sur Leboncoin.fr, écumer les vide-greniers, traquer les bonnes affaires sur les sites de dons, glaner à la fin des marchés ou récupérer les invendus dans les poubelles, mais aussi consommer équitable ou local, se fournir dans des AMAP, etc. Qu’elles remettent en question la logique maximisatrice du consommateur en promouvant d’autres valeurs éthiques ou écologiques, qu’elles requalifient symboliquement ou distinctivement d’anciennes pratiques (faire du vélo, jardiner) ou qu’elles se situent aux marges des comportements caractéristiques de la société de consommation, ces pratiques ont un statut qui reste encore mal documenté.

Comment rendre compte de ces formes de consommation et comment les interpréter ? Quels en sont les contours au-delà des pratiques les plus médiatisées ? Permettent-elles à des classes populaires fragilisées de repousser le manque et de se réinsérer dans la société de consommation ? Ou correspondent-elles à des formes d’engagement et de positionnement vis-à-vis de la société de consommation de la part de classes moyennes et supérieures à haut niveau de diplôme ? Dans la galaxie des pratiques de consommations alternatives qui connaissent un nouvel essor aujourd’hui, beaucoup combinent des régimes d’engagements utilitaristes – consommer « malin », moins cher, se débrouiller – et des pratiques à coloration plus politique – consommer mieux, moins, avec un impact moindre sur la planète, etc. Cette dimension politique peut être explicite (cas des freegans ou des AMAP par exemple) ou très secondaire (cas de la plupart des sites de consommation collaborative tels que BlablaCar, Airbnb, Drivy…). Elle pose la question plus large du renouveau des formes de questionnement politique des pratiques de consommation, des acteurs qui les portent, et de leurs positionnements par rapport aux traditions et répertoires de mobilisation existants (buycott, boycott, etc.).

Axes thématiques

Ce dossier vise à réunir des contributions empiriques éclairant les logiques économiques, sociales et politiques des pratiques de consommation alternatives, actuelles et passées. Les contributions attendues, issues d’enquêtes originales en sociologie, anthropologie, histoire ou science politique, pourront inscrire leurs réflexions au sein des quatre axes de questionnements privilégiés suivants :

1/ Histoire des consommations alternatives : acteurs, outils et régulation.Encore peu de travaux historiques documentent les formes de consommations alternatives, leur genèse et l’évolution des justifications qui en sont données, de même que le rôle des acteurs qui les portent et les types de régulation qui les encadrent. Quel est le rôle des crises économiques dans les pratiques de débrouille visant à consommer sans dépenser ? Quels ont été les rôles respectifs des médias, des entreprises, des pouvoirs publics et des associations de consommateurs dans la critique de l’hyperconsommation et la valorisation de pratiques alternatives comme le manger bio, le recours aux circuits courts, le commerce éthique, ou la baisse de sa consommation énergétique ? Par quels types d’outils agissent-ils à travers le temps (messages publicitaires, réglementation, labels, presse d’information aux consommateurs…) pour valoriser d’autres modes de consommation et avec quelles conséquences sur les pratiques effectives ? Comment des consommations anciennes sont-elles redécouvertes et retravaillées pour devenir un enjeu éthique ? Comment, en définitive, penser les frontières mouvantes entre consommation ordinaire, consommation alternative et consommation engagée au cours du temps ?

2/ Profils et motivations des consommateurs « alternatifs ».  Comment qualifier les pratiques de consommation alternative ? Entre les intentions militantes et anticonsuméristes et l’obligation de « faire de nécessité vertu » se dessinent des pratiques multiples, parfois contradictoires, dont on cherchera à analyser les ressorts. Qui sont les usagers de ces autres modes de consommation à côté des circuits de distribution conventionnels ? Ces pratiques revêtent-elles le même sens selon les positions sociales occupées, le genre et l’âge des individus ? Ces pratiques sont-elles des modes de consommation utilitaires et dominés ou à l’inverse, permettent-elles aux consommateurs de relâcher des formes de contraintes sociales ?

3/ Au cœur des pratiques de consommation alternatives : formes des interactions et des échanges. On pourra interroger l’apprentissage des rituels qu’implique la socialisation à des formes d’échanges alternatives ou engagées : comment apprend-on à chiner dans un vide-grenier ou à trier les invendus dans les poubelles ? Comment sont-elles mises en place par les acteurs, quelles sont leurs temporalités ? Comment les pratiques “alternatives” s’articulent-elles aux autres formes de consommation plus traditionnelles chez les individus ? Par ailleurs, on pourra se pencher sur les formes et les cycles des interactions qui ont lieu au cours d’échanges en régime de consommation alternative : consommer dans des magasins éthiques, donner ses vieux meubles, louer la maison d’un particulier… quelles sont les valeurs et les références mobilisées par les acteurs pour cadrer leurs interactions ? Comment ces échanges interrogent-ils à nouveaux frais la manière de penser l’échange (non) marchand et les trajectoires des objets (acquisition, circulation, mise au rebut) ?

4/ L’économie des consommations alternatives à l’épreuve du web.  Le web a donné un nouvel élan à ces pratiques anciennes, en les transformant probablement au passage. Alors que les plateformes de consommation collaborative ou partagée se multiplient et que les sites de dons entre particuliers ou d’achat d’occasion sur internet fonctionnent à plein régime, quels sont les acteurs et les trajectoires économiques des intermédiaires de la consommation alternative ? Comment le web a-t-il produit de nouvelles opportunités et changé le paysage de ces consommations ? Dans cette perspective, on pourra aussi interroger le rôle des réseaux sociaux dans les appels aux boycotts et la conscientisation des consommateurs.

Modalités pratiques d’envoi des propositions

Les articles, de 50 000 signes maximum (espaces, notes et bibliographie compris) ou les notes critiques, de 30 000 signes maximum, accompagnés de 5 mots-clés et d’un résumé de 150 mots (en français et en anglais), devront parvenir sous forme électronique aux coordinateurs du numéro,

avant le 6 février 2017 aux adresses suivantes :

La revue accueille par ailleurs des articles hors dossier thématique (50 000 signes maximum), qui doivent être envoyés à Carine Ollivier, carine.ollivier@univ-rennes2.fret Vinciane Zabban, vinciane.zabban@gmail.com

Comité éditorial

  • Élodie Béthoux (maîtresse de conférences, ENS Cachan, IDHES)
  • Éric Dagiral (maître de conférences, Université Paris Descartes, CERLIS)
  • Carine Ollivier (maîtresse de conférences, Université Rennes 2, CIAPHS)Ashveen Peerbaye, Rédacteur en chef (maître de conférences, Université Paris Est Marne-la-Vallée, LISIS)
    Caroline Vincensini (maîtresse de conférences, ENS Cachan, IDHES)

Comité de rédaction 

  • Pauline Barraud de Lagerie (maîtresse de conférences, Université Paris Dauphine, IRISSO)
  • Antoine Bernard de Raymond (chargé de recherche INRA, RITME)
  • Jean-Samuel Beuscart (chercheur, SENSE, Orange Labs)
  • Vincent-Arnaud Chappe (post-doctorant, EHESS, CEMS-IMM)
  • Hélène Dufournet (post-doctorante, Université de Toulouse, CERTOP)
  • Milena Jaksic (chargée de recherche CNRS, ISP Cachan)
  • Olivier Le Noé (professeur, Université Paris Ouest Nanterre, CeRSM)
  • Élise Palomares (maîtresse de conférences, Université de Rouen, DYSOLA)
  • Maxime Quijoux (chargé de recherche CNRS, Printemps)
  • Anne Revillard (professeure associée, Sciences Po, OSC-LIEPP)
  • Marie Trespeuch (chercheuse, SENSE, Orange Labs)
  • Vinciane Zabban (maîtresse de conférences, Université Paris 13, EXPERICE)

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